- 30 clefs pour communiquer – Introduction
- 30 clefs pour communiquer – §1 : le respect de soi et des autres
- 30 clefs pour communiquer – §2 : l’ouverture
- 30 clefs pour communiquer – §3 : L’écoute.
- 30 clefs pour communiquer – §4 : La recherche du consensus.
- 30 clefs pour communiquer – §5 : D’accord, mais sur quoi ?
- 30 clefs pour communiquer – §6 : Communicatif et communicant.
- 30 clefs pour communiquer – §7 : Le devoir de discrétion.
Pour éviter des erreurs de concepts, rappelons d’abord que l’écoute est un instrument destiné à l’autre. Nous aurions tous à citer de nombreux exemples de personnes s’écoutant attentivement (et souvent avec admiration), mais elles sont très rarement communicantes. Les buts de la communication étant avant tout l’échange d’information et la recherche de l’harmonie, on ne peut les atteindre qu’à travers la collecte de cette information, seulement possible par l’écoute et de son traitement consensuel pour obtenir l’harmonie.
part les obstacles physiques, de nombreuses fois décrits (avec plus ou moins de bonheur) et sur lesquels nous ne reviendrons pas, il en est d’autres, plus importants, parce qu’ils regardent la volonté d’écouter.
Celui qui parle veut être sûr qu’il ne perd pas son temps, son énergie et une information qu’il croit digne d’être communiquée. Il veut être écouté. Celui qui entend, s’il pense que ce que dit l’autre peut présenter un intérêt (pour lui-même) a tendance à écouter.
Le branchement est établi. Mais cet intérêt mutuel, pour parler et écouter, est un mélange très instable, fusible et quelque fois explosif. Les informations qui parviennent au cerveau de l’auditeur rencontrent celles, du même domaine, qu’il possède déjà ; elles peuvent se rapprocher de celles qu’il a déjà eues, étudiées et rejetées ; de celles qu’il n’a jamais eues et dont il se méfie comme de toute nouveauté ; de celles qui lui paraissent des truismes, donc de peu d’intérêt, même si, souvent, les choses sont du domaine public parce que, justement, leur validité est avérée. Tout ce qui vient de l’autre et qui n’est pas ce qu’on aurait dit soi-même sur le même sujet prête forcément à caution. Attirent aussi notre attention tous les propos qui notent les différences entre soi et l’autre : culturelle, sociale, morale, philosophique, etc. Il est difficile d’être communicant sans accepter d’être contredit, quelques fois heurté par les propos de l’autre.
Le résultat de ce tamisage est une volonté d’intervention, dans le cas de la recherche de l’harmonie ou d’abandon, quand les informations reçues ne paraissent pas compatibles (dans leur esprit, leur forme ou leur intention) avec le propre fonds d’information de l’auditeur. Cependant, l’intervention, comme l’abandon, sont à manier avec une extrême précaution.
La volonté d’intervention centre nécessairement l’auditeur sur ce qu’il veut formuler en intervenant, ce qui le « déconnecte » du discours de l’autre, qui, s’il est perspicace, devrait se taire, pour, d’abord, récupérer l’attention de son vis-à-vis et ensuite, faire sienne la pensée (en l’écoutant) que l’autre veut exprimer, pour l’intégrer dans la stratégie de son discours. Soumettre un acheteur potentiel à un long discours débité sans égard pour les réactions du client potentiel et s’entendre dire, à la fin que « le produit est parfait, c’est sûr, car je l’ai acheté hier et j’en suis très content », est un mauvais investissement en énergie et un facteur de démotivation.
Il convient donc de laisser à celui qui écoute les espaces de liberté de s’exprimer, pour le bénéfice des deux. Et il convient, pour celui qui écoute, de faire savoir (les petits trucs ne manquent pas) qu’il aimerait intervenir. La « politesse » qui interdit d’intervenir est payée deux fois. La première en supportant un discours qui peut ne plus nous intéresser, la seconde en n’ayant pas reçu une information, peut-être valable, pour n’avoir pas indiqué la partie du domaine évoqué qui nous intéresse. Le but de celui qui parle est d’atteindre sa cible. Il ne peut être offensé de l’aide qu’on lui apporte pour mieux viser. La manière de le faire est question de courtoisie.
L’écoute est aussi une attitude de tout l’être. La communication n’est jamais seulement la somme des paroles prononcées. Le non-dit, sous-entendu, induit, suggéré, la valeur du contenu émotionnel, le degré de confiance instauré dans l’échange, le taux de confidentialité (différente de la confiance qui concerne une certaine manière de se découvrir, quand la confidence peut concerner une autre personne que celle qui transmet l’information), font que le contenu perçu d’un échange procède souvent autant de l’intuition, de l’analyse de l’événement que du contenu sémantique des paroles échangées. Une bonne écoute se fait avec le cerveau, le cœur et les antennes de l’intuition.
L’écoute seule, enfin, peut être le seul élément pertinent de certaines communications. Qui dira jamais assez l’importance pour l’être en souffrance de se savoir écouté? Pensez à ces dernières paroles de mourants qui expriment souvent alors leurs profondeurs et se rassérènent grâce à une écoute bienveillante. L’émotion qui a besoin, souvent, de s’exprimer, sans nécessité de réponse, mais pas « dans le vide ». L’aveu, rejet du poids de la faute, qui ne peut être bienfaisant que grâce à une écoute, qu’elle soit compatissante, critique ou élément précurseur d’un châtiment.
La clé de l’écoute : garder à l’esprit que la voix qui nous vient d’ailleurs n’est pas forcément l’écho.