30 clefs pour communiquer – §2 : l’ouverture

Article 3 de 8 du dossier 30 clefs pour mieux communiquer

Il existe, en astrophysique, un principe baptisé « la limite de Roche ». Il nous enseigne (en gros) que deux corps importants (grandes planètes, étoiles) allant l’un vers l’autre ne se rencontreront jamais comme deux boules de pétanque, en un point d’impact.

Comme chaque point de ces deux corps s’attirent mutuellement, et ceci en fonction de la distance entre eux – et entre chacune de leurs parties – les points les plus rapprochés tendront à se rejoindre plus vite que les points les plus distants. Et ceci aura pour effet que les deux planètes ou étoiles se désagrègeront, les points les plus proches se précipitant les uns vers les autres, suivis, plus lentement, des plus distants. Pour ne faire qu’un nouveau corps, ces deux objets astronomiques ont dû se défaire, s’ouvrir. Au niveau humain, comme ce phénomène n’est pas spontané, l’Homo Communicans doit s’ouvrir et aider l’autre à en faire autant, pour que leur sphère de communication se refasse à partir de leurs deux volontés de communiquer. Il est important que ces volontés de communiquer soient, comme les points les plus proches des deux sphères, les éléments les plus rapides à se mettre en avant.

Signifier sa volonté de communiquer, donc de s’ouvrir à l’autre est l’essence de la mise en confiance, le propre de l’invitation. Le salut qui veut que, depuis le début des âges, où on lève la main pour montrer qu’elle est désarmée ou le shake-hand, plus récent, où on accepte un premier contact physique, avec quelqu’un qu’on rencontre pour la première fois, ont très exactement cette signification. C’est pourquoi la nature de cette « poignée de main » est si importante. Le prétentieux imbécile qui vous broie la main pour vous montrer combien il est fort ne fait que vous dire par cette faute de respect, qu’il entend qu’on sache qui domine.

Mais comme il s’agit d’une tentative d’intimidation par la force physique, il est douteux qu’il obtienne chez vous des dispositions communicantes favorables. Sauf chez ceux qui ne vivent bien la communication qu’en état d’infériorité, ce qui existe ; ce serait une faute de négliger le poids des névroses dans la communication. Donc, si le broyeur de mains le fait avec discernement, il peut obtenir certains succès d’estime. Mais, pour éviter des erreurs de lecture chez les névrosés, peut-être est-il plus prudent de donner une main seulement ferme (et sèche si possible). Car, à l’inverse, une main molle paraît un objet abandonné provisoirement à l’attention de l’autre, sans participation de son propriétaire, comme coupée des énergies de ce dernier, donc sans intérêt de sa part. Les gens qui prêtent ce genre de main regardent souvent ailleurs qu’au visage de leur victime, en le faisant.

L’être humain est tout orifices. Pour s’en tenir au visage, les yeux et la bouche sont les plus significatifs et par conséquence, le sourire (ouverture de la bouche) est rarement interprété comme une intention de montrer les dents, quant aux yeux, ils seraient, selon la sagesse populaire, les fenêtres de l’âme ; les dérober génère un mal-être qui peut s’interpréter de mille façons et l’autre choisira probablement la pire.

L’ouverture doit aussi être présente dans l’attitude discursive. Passer son temps à dire à l’autre que « ça m’étonnerait », que « c’est dur à croire », que « ça ne t’ennuie pas de parler un peu plus bas », ou que « c’est possible, mais ce ne sont pas mes affaires », rend la communication moins enthousiaste, quand ça ne la stoppe pas net. En somme, même si on est en désaccord (ce qui est plus positif que « ne pas être d’accord ») avec quelqu’un, il faut rester ouvert, accepter ce qui vient et prendre le temps, d’ailleurs avec plus d’information si on « laisse parler », de revenir sur les éléments du désaccord.

Être ouvert aussi dans l’attitude et les attentions. Faire entrer quelqu’un dans un salon et le prier de s’asseoir en désignant un des quatre fauteuils qui sont là, au lieu de le laisser choisir son siège est un début de contrôle, qui, s’il est souhaité, fonctionne bien, mais s’il n’est pas question de dominer l’autre, rejoint la poignée de main assassine dans le sac des brutalités inutiles. Demander à quelqu’un ce qu’il souhaite boire, plutôt que lui demander s’il veut boire une bière, lui donne aussi un sentiment de liberté et de respect de ses souhaits favorables à l’ouverture de la communication.

Pour parfaire une bonne ouverture, il convient de respecter le rythme de l’autre. Quand un bébé apprend à marcher, on le suit, pas à pas, sans le toucher, mais prêt à l’aider et on marche à sa vitesse. Une démarche de cette nature est l’esprit même de l’ouverture en communication. Non qu’il faille considérer l’autre comme immature ; simplement, en adaptant son rythme, on signale notre attention et notre disponibilité, notre ouverture.

La clé de l’ouverture : savoir qu’il faut délicatement peler le fruit pour en savourer la chair.

 

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