Depuis l’école d’Athènes, magnifique tympan au Vatican, superbement mise en scène par Rafaël, en passant par Molière avec son école des femmes, aux grandes écoles de prestige, comme Polytechnique, Harvard, Oxford et autres, de prestigieuses institutions, dans le monde entier honorent la volonté de l’Homme de générer l’excellence.
On enseigne tout, partout, à l’exception d’une matière, peut-être la plus fondamentale : comment être Parents.
Une timide approche, dans les pays socialement très développés, est tentée avec les femmes enceintes, qui, au cours de séances multidisciplinaires apprennent l’art et la manière d’accoucher et de donner les soins convenables au nouveau-né, pour que son entrée dans ce monde soit le moins traumatique possible. Dans certains cas les futurs pères sont acceptés.
Mais cet élan pré et post-natal, souvent sans suite, ne donne aucune recette pour élever l’enfant, de zéro à quinze ans, période durant laquelle il forme sa subjectivité sociale, ses valeurs morales, sa conscience d’appartenir à une espèce, supposée la plus haute de l’échelle biologique et les devoirs que cela lui crée, tels le respect de la vie, le devoir d’assistance et de compassion, la lutte contre l’égoïsme, la manière de vivre ou le mot respect et amour ont à peu près la même définition, comme uniques vecteurs du bien vivre et du vivre ensemble.
Sans en faire une statistique globale, on compte aujourd’hui une part importante des jeunes humains qui ne réalisent pas que ce n’est pas le « fond » de leur cœur qui les relie au reste de l’humanité, mais bien leur manière objective d’agir vis-à-vis de leurs parents, de leur fratrie, de leurs congénères, de leurs maîtres, de gens de tous âges, spécialement les plus âgés. S’ensuit une déchéance du respect de soi, rapidement étendue aux autres, fermant un cercle où ils n’auraient pas été enfermés si leurs parents avaient choisi avec eux des chemins plus compatibles avec ce respect de soi et des autres.
Comme il est naturel, une vie sans astreinte ni règle, n’obéissant à aucune contrainte, est plus attirante et quand une telle « pente » devient répréhensible, toute tentative de redressement du cap est ressentie comme une injustice qui peut conduire vers un état amoral et asocial, dont on ne revient que rarement.
On peut légitimement soutenir que ce désagréable tableau du « zéro à quinze ans » est de la responsabilité des parents, exclusivement.
Suivant le vieil adage « le chemin se crée en cheminant » (A. Machado), élever un enfant est donc une œuvre de chaque instant. Comme on lui tient la main pour lui apprendre à marcher, on doit soutenir ses acquisitions de conscience à travers le langage et l’exemple.
Il est aujourd’hui à la mode de vouloir effacer les différences éducatives entre enfants des deux sexes. Cette attitude irresponsable conduit à des ambigüités mères de toutes les déviances. De nombreuses études ont montré une tendance marquée pour chaque sexe à choisir des jouets connotés comme « sexués », poupées, etc… pour les filles, camions, etc… pour les garçons. Est-ce si difficile d’accepter certaines évidences ? On pourrait d’ailleurs là aussi autonomiser l’enfant sous l’œil des parents.
Un autre chemin doit être choisi et parcouru avec attention : celui des limites aux pulsions de l’enfant jeune. Une mode, voici une quarantaine d’années aux Etats-Unis a donné des résultats désastreux : il s’agissait de laisser l’enfant libre, sans entrave ni réprimande. Sans autre limite que sa volonté. Cette pente facile a donné des adolescents et des jeunes adultes en révolte contre tout ce qui n’était pas leur volonté. Donc en révolte contre toutes les « obligations » et « normes sociales » par lesquelles ils ne se sentaient pas concernés. Les états, souvent dramatiques, de ces résultats ont nécessité une génération pour s’estomper et deux pour quasi disparaître.
Une génération lègue à la suivante son lot de fonctions sociales, humaines, technologiques, etc…, pas forcément des chefs-d’œuvre et, réduites à l‘échelle de l’individu, souvent les produits d’échecs et de regrets obérant le jugement sur ce qui doit être jugé transmissible à l’enfant. Le travail d’introspection nécessaire là pour les parents peut (devrait ?) chercher l’aide de psychologues – plus spécialement pédopsychiatres, nos maîtres en ce domaine – pour éviter les plus gros écueils.
Ces quelques réflexions suggèrent qu’il serait intéressant d’instituer une « école des parents », quelques mois avant une naissance, dont le programme aiderait les néophytes du genre à prendre des résolutions raisonnées pour donner à leur progéniture le plus de chances possibles d’accéder au bonheur simple d’être un Humain décent dans son être et dans sa conduite.
Être une part d’une société suppose le respect de règles morales inculquées dès la prime enfance. À défaut et logiquement, on libère des êtres amoraux. On peut agir de façon immorale, par ignorance ou incompréhension, puis en avoir conscience et rectifier, car l’immoralité suppose la connaissance du principe et une conduite plus ou moins en accord. L’amoralité est une absence du principe moral dans la pensée et les actes de certains, qui les marginalise radicalement. Sont souvent amoraux des sujets qui ont été « annulés » par la satisfaction de tous leurs désirs, de la part de leurs parents ou d’un milieu social sur favorisé.
Pour suivre une route sure, il n’est pas important de savoir où sont les obstacles, mais plutôt où ils ne sont pas.
Un cours du soir, peu contraignant, de deux heures, cinq jours par semaine, pendant trois mois, soit 120 heures, serait probablement suffisant pour évoquer les structures comportementales des enfants durant leur prime développement et leur adolescence et les attitudes correspondantes indispensables de leurs parents.