La démocratie par l’absurde.

Le mécanisme inventé dans le domaine électoral est simple. Simplet, même.

Tout passe par les médias et leurs propriétaires.

Les forces en présence : le peuple, les candidats, les grands intérêts financiers, les tensions géopolitiques, les pressions religieuses, les communautés.

Le grand enjeu : utiliser au mieux, pour chaque partie, le niveau « moyen » de l’intelligence des masses et leur inculture politique.

Il n’y a que peu à faire pour l’intelligence des masses, mais toutes les portes sont ouvertes au façonnage de leur culture politique. C’est le domaine quasi absolu des médias.

Une part importante de l’électorat ne fait que porter dans les urnes les bulletins de votes des médias.

Il est facile de conduire une étude sur l’action « formatrice » des médias et de leurs invités-phares, le plus souvent issus de la presse écrite d’opinion. Elle ne laisse guère de doute.

L’analyse -diffusée – du même événement par trois chaines d’information, que nous avons conduite lors de ces élections présidentielles, donne des résultats qui confinent au comique. Depuis le passage sous silence de telle information qui pourrait favoriser tel candidat, jusqu’à sa mise en exergue, en passant par toutes les nuances de gris, au gré de la position politique générale de la chaine, a quelque chose de surréaliste, qui trouve son comble quand on en retrouve le fruit dans la bouche du « peuple » interpelé dans la rue.

Les caricatures issues de la pédagogie médiatique – tant celles des candidats comme celles des événements – sont telles qu’on est fondé à se questionner sur la nature de celle-ci : assiste-t-on à un embrigadement populaire ou à une propagande décérébrant ce même peuple ?  Questionnés sur les raisons de leur engouement pour tel candidat, les interviewés disent apprécier chez leur champion le « look », la faconde, la pugnacité, la rigidité de leurs opinions… et les promesses démagogiques qui ne pourront jamais être tenues. Le réalisme, le programme de gouvernement, les conséquences de son adoption dans la réalité ne sont jamais de mise.

Et cela continuera de fonctionner, car le peuple ne remet pas en cause « l’information » diffusée par la télévision, entre les nouvelles locales et le match de football. De plus, les distorsions infligées aux « nouvelles » restent dans les limites du suggéré, du mensonge par omission, du sous-entendu, ce qui en somme fonctionne le mieux pour une oreille non avertie, ou avertie au niveau de la conversation de comptoir.

Si on ajoute à cela les effets pervers du bipartisme – qui n’est pas près de disparaitre – la moitié du peuple souffre pendant un mandat, espérant que l’autre moitié sera châtiée à son tour, lors de l’alternance. On pourrait trouver mieux pour l’unité nationale.

Mais, à moins que ces symptômes de décadence de l’information ne conduisent à une guerre des médias (qu’il faut appeler de nos vœux), il faut admettre que ces médias ont gagné contre le peuple. Ils l’on asservi.

De contre-pouvoir qu’ils pouvaient être pour le bien de la démocratie, les médias sont devenus le Quatrième Pouvoir, qui, étant au plus près du peuple, domine le trois autres. La liberté d’expression commence à ressembler étrangement à celle de manipuler la démocratie. Cette même démocratie, par définition dans la main du peuple manipulé, qui ferme ainsi le cercle vicieux dont il est victime.

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